N°117 - Le Monde de la Nuit
Enfant, au cours des fêtes nombreuses qui traversaient la vie de ma famille adoptive, j'ai observé avec attention ceux qui préféraient assis sur une chaise. Pourquoi ne dansaient-ils ? Pourquoi se privaient-ils de ce plaisir immense ?
Ils restaient assis, silencieux, regardant ceux qui dansaient d'un regard un peu envieux...En discutant avec j’ai compris bien des choses ; Certaines n'avaient la chance d'être suffisamment jolies pour attirer les garçons. D'autres étaient extrêmement timides et rougissaient affreusement, perdant pied brusquement face à un garçon, refusant d'un geste nerveux de la tête d'aller sur la piste avec lui. D'autres, aussi, n'avaient jamais appris à danser....les complexant affreusement, à jamais.
Aujourd'hui, je regarde encore l'attitude des enfants sur une piste de danse. Les mariages, les communions, en sont un exemple vivant...Eux n'ont pas encore de complexes, aiment s'amuser simplement sans se prendre la tête, ne s'occupent pas de ceux qui les regardent. Quand la musique éclate, les enfants se sourient, se prennent instinctivement par la main et vont danser joyeusement, sous le regard attendri de leurs parents.
Il faut les pousser dans ce sens. On oublie trop souvent combien danser sous le regard des gens vous donnent confiance en vous...Nous avons tous en nous l'amour de la musique, du rythme qui vibre au fond de nous, nous donne le sourire. Il nous reste juste à affronter le regard des autres....
J'avais 34 ans quand j'ai osé franchir, seule, la porte d'une discothèque, un beau soir de juin. Le doigt timidement posé sur le bouton de la porte, quand celle-ci s'est ouverte, sur un grand garçon, au sourire chaleureux, terrifiée brusquement, j'ai failli me sauver en courant. Je sortais peu à cette époque. Mon divorce m'y a poussé. Ce fut pour moi une véritable révélation...
Durant des années, une fois par semaine, je m'octroyais une soirée à danser, à me libérer de toutes ces tensions que j'accumulais, à retrouver confiance en moi même...Sans jamais avoir franchi une école de danse, je suis devenue pourtant une Travolta en jupon...le corps désormais possédé par la musique.
Je me cachais au début au milieu de la piste, puis fermais les yeux...Quand la musique résonnait, elle me faisais vibrer, me propulsait en avant. Mon corps tressaillait,, commençait à bouger, ondulait, m'échappait...la musique coulait en moi comme la sève des arbres coule voluptueusement dans leurs branches...
Je n'étais plus cette jeune femme, qu'un nouvel avenir, sans Lui, terrifiait. Les yeux fermés, au début, j'oubliais ces gens inconnus qui m'entouraient, m'observaient...Je me laissais aller à danser, emportée dans un autre monde...Quand mes pieds devenus brûlants d'avoir dansé me rappelaient à l'ordre, enfin, je m'arrêtais, sans prendre conscience des heure qui avaient passé...J'avais tout oublié...tristesse, chagrin, soucis, peur du lendemain, désillusions sur un amour disparu...
La musique et la danse ont eu sur moi, cette année là, une influence décisive...Je me suis recréée un nouveau cercle d'amis et amies...les amis du monde de la nuit...On ignore qu'après un divorce, vos anciens amis vous fuient, ne sachant comment réagir....Ils ont juste oublié combien cette attitude peut blesser...alors que ma porte était toujours ouverte,qu'il y avait toujours une assiette à partager, une épaule sur laquelle s'épancher...un peu d'argent à leur prêter.
J'ignorais que les amitiés sont - parfois - infidèles...qu'elles sont souvent dictées par différentes raisons personnelles, que l'argent peut devenir entre vous un véritable couperet, quand vous demandez ce qui vous est dû, brusquement ceux-ci disparaissent à jamais. J'ai jeté au feu mon ancien carnet d'adresses sans regrets. J'ai enterré le passé et ses illusions.
Ensuite, j'ai réappris à renaître, à avancer, à mieux sélectionner mes amitiés....Mais la musique et la danse ne m'ont plus jamais quittée...J'ai découvert combien une journée peut être belle; combien des véritables amitiés peuvent réchauffer le coeur à jamais...
13/7/07
Marie